Le Plan Taxi selon Pascal Smet : un déni de concertation sociale conduisant à la précarisation de 4000 chauffeurs

À Bruxelles, plus de 4000 familles risquent d’être mises dans des situations socialement et économiquement précaires. Le Plan Taxi, dont les détails ont été dévoilés fin avril, vise un bouleversement total du secteur du transport rémunéré de personnes : plus de 4000 acteurs du secteur, à savoir les chauffeurs exerçant actuellement dans ce secteur, seront sacrifiés afin de promouvoir un système néolibéral. Par ailleurs, s’il est supposé que ce plan soit financé par le contribuable, il est moins sûr que ce dernier en retire un quelconque avantage. 




Le Plan Taxi ou l’individualisation des licences pour une libéralisation à outrance du secteur du transport rémunéré du transport des personnes

Fin avril, le Ministre bruxellois de la mobilité, Pascal Smet (SP.A), a présenté son Plan Taxi aux acteurs du secteur du  transport rémunéré de personnes, au parlement de la Région Bruxelles-Capitale et aux médias. Ce plan vise principalement à individualiser les licences : celles-ci ne seront plus attachées à une voiture mais seront désormais délivrées à chaque chauffeur. Ainsi, dorénavant, les chauffeurs seront titulaires, chacun, d’une licence personnelle avec laquelle ils pourront exercer leur métier.
À Bruxelles, le secteur du transport rémunéré de personnes comprend 1272 taxis classiques et 366 voitures « limousines », soit un total de 1638 voitures. Actuellement, on dénombre 4000 chauffeurs employés dans ce secteur pour conduire ces voitures. Or, l’individualisation des licences aurait pour conséquence l’augmentation du nombre de voitures, lequel pourrait atteindre potentiellement 4000 taxis et limousines à Bruxelles. Par ailleurs, dans la mesure où l’accès au métier de chauffeur de taxi n’est pas limité, il est fort à parier qu’avec le taux de chômage qui touche actuellement le marché de l’emploi en Belgique, cette augmentation ira très probablement bien au-delà de ces 4000 taxis.

Un Plan Taxi aux conséquences négatives tant pour les chauffeurs que pour les usagers et les contribuables

Selon de récentes études, commandées par le cabinet du Ministre de la mobilité, il apparaît que la rentabilité du secteur est très faible. Dans un tel contexte, une augmentation du nombre de voitures de 1638 à 4000, qui aurait pu, il est vrai, être un facteur d’amélioration de la qualité générale du service, aura, au contraire des conséquences toutes autres : une diminution de la rentabilité, la suppression du statut de salariat en faveur du statut de faux indépendant et l’augmentation des embouteillages dans Bruxelles.
Le cabinet, et certains acteurs du secteur du transport rémunéré de personnes n’ayant aucune responsabilité envers ces 4000 chauffeurs que la mise en liaison contractuelle avec les clients, proclament que le nombre de chauffeurs n’évoluera pas et qu’un tel plan n’aura aucun impact dans l’hypothèse où chacun travaille avec sa voiture. Or, il convient de souligner qu’actuellement une voiture est conduite en moyenne par deux ou trois chauffeurs, ce qui offre à ces derniers de travailler dans des conditions de travail correctes et de ne pas se tuer à la tâche. Dans le cadre du Plan Taxi, une telle situation ne pourrait perdurer puisque chaque chauffeur ayant sa propre voiture, ces derniers auront tout intérêt à travailler plus (6 à 7 jours par semaine, au minimum 16 heures par jour) pour que son activité soit financièrement rentable.
Le Plan Taxi prévoit un mécanisme de compensation des employeurs et indépendants qui feraient le choix d’arrêter leur activité malgré les investissements non-négligeables pourtant consentis pour être actif dans le secteur dans son état actuel. La question qui se pose est de savoir si c’est au contribuable qu’il revient de payer pour ce nouveau système ? En effet, dans le système vanté par ce Plan Taxi, seules les plateformes de mise en relation des clients et des chauffeurs, telles qu’Uber, s’en sortiraient le mieux, alors que généralement ces multinationales, ne se démarquent pas par le respect de leurs obligations fiscales dans les pays dans lesquels elles sont implantées et engrangent des bénéfices financiers.

Un plan taxi dont l’élaboration est marquée par une absence de concertation sociale avec l’ensemble des acteurs du secteur du transport rémunéré de personnes

Lors de la présentation du Plan Taxi, le Ministre Pascal Smet a tenu à souligner que son plan était le résultat d’une consultation du secteur du transport rémunéré de personnes dans son ensemble. Toutefois, les syndicats, les organisations représentant les indépendants et les employeurs démentent ces propos. En effet, pendant les deux qui ont précédé la présentation de ce plan, le cabinet du Ministre n’a aucunement communiqué au sujet de ce plan dans le cadre des réunions du Comité consultatif régional des taxis et des voitures de location avec chauffeur pour la Région de Bruxelles-Capitale, lequel regroupe pourtant, notamment, des délégués du cabinet, de l’administration et de chaque acteur du secteur. Certes, il est vrai que certaines plateformes de mise en liaison de clients et taxis se disent enthousiastes de la mise en œuvre de ce Plan Taxi. Cependant, de telles plateformes, lesquelles bénéficieront économiquement d’une augmentation du nombre de taxis et potentiellement du nombre de ses adhérents et, n’ont donc aucune responsabilité envers les chauffeurs et les autres acteurs du secteur, représentent-elle vraiment le secteur dans son ensemble ?
Bien entendu, il est indéniable que le secteur a besoin d’une modernisation en vue d’augmenter la qualité du service, d’améliorer les conditions de travail des chauffeurs, et pour plus transparence, l’ensemble des acteurs du secteur partage d’ailleurs cette préoccupation. Cependant, le Plan Taxi dans sa mouture actuelle, n’apparaît pas comme le meilleur chemin vers cette nécessaire modernisation, au vu des répercussions négatives qui le caractérisent. Des propositions concrètes ont été transmises au cabinet du Ministre Smet et aux parlementaires de la Région Bruxelles-Capitale. Il faut souligner que ces propositions intègrent des acteurs modernisateurs tels qu’Uber, alors même que depuis plus de 3 ans, cette plateforme fait travailler une majorité de ses chauffeurs en toute illégalité, et ce, sans que le Ministre ou son cabinet n’intervienne.

Les propositions, émanant du secteur du transport rémunéré de personnes, ne sont certes pas aussi révolutionnaires que celles prévues, actuellement, par le Plan Taxi de Pascal Smet. Pour autant, cela ne donne pas un blanc-seing au Ministre Pascal Smet qui se doit de veiller au respect de la concertation sociale qui s’impose d’autant plus lorsqu’il s’agit de légiférer dans une matière qui risque d’impacter aussi négativement tout un secteur d’activité.

Comments

  1. Signer la pétition

    https://www.change.org/p/general-population-stop-au-plan-taxi-de-pascal-smet

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